11.05.2018

Y a t'il un risque d'uberisation de la médiation

Si la technologie permet d’entrevoir l’intrusion croissante de la technologie dans le processus de
médiation, cette menace ne peut prétendre se soustraire irrévocablement au joug du législateur. En
outre, les praticiens de la médiation ne sauraient user de ce prétexte pour s’exonérer du respect de leur
déontologie.

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La digitalisation des activités est de nature à faciliter l’intervention de nouveaux acteurs sur le
marché. Au contraire des acteurs historiques d’un secteur, ceux-ci n’ont pas à gérer une transition vers la
digitalisation, notamment en ce qui concerne la conservation d’archives. Leurs efforts ainsi que leurs apports
financiers sont donc uniquement employés dans le but de démarrer une activité. Cette situation leur confère
donc d’ores et déjà un avantage indéniable sur les acteurs traditionnels du secteur qui doivent administrer
un passé professionnel tout en anticipant les évolutions de leur pratique.

Ceci restreint nécessairement l’avantage dont bénéficient du fait de leur histoire, les praticiens traditionnels
dont l’activité et le développement pâtit de cette transition vers le numérique.

Afin de développer cette hypothèse, il peut être possible d’envisager de transposer au domaine de la
médiation, le conflit qui a opposé la société Uber aux sociétés de taxis traditionnels. On envisage ainsi qu’un
acteur semblable à la société Uber pourrait arriver dans le secteur de la médiation et ruiner l’avantage dont
bénéficiaient jusqu’à présent les médiateurs traditionnels.

L’importance de ce bouleversement pourrait occasionner des difficultés financière plus ou moins
importantes aux médiateurs. Elle pourrait même menacer la survie de certains de ces praticiens.
La crainte de cette menace pourrait être portée en tant que revendication par les acteurs traditionnels de la
médiation à l’occasion d’une action de lobbying.

Le législateur pourrait alors être tenté d’intervenir en faveur des revendications émises par les acteurs
traditionnels de la médiation, si toutefois, les associations de médiateurs parvenaient à influencer le
gouvernement. Dans le cas d’Uber, le lobbying des taxis aura été efficace en raison d’un fort pouvoir de
nuisance de ceux-ci ainsi que de l’exposition médiatiques importante dont ils ont pu bénéficier.Tout porte donc à croire que le législateur se saisirait tôt ou tard de la question de la médiation en ligne. En
effet, les associations qui regroupent les médiateurs pourraient sans doute bénéficier d’un même crédit
puisque la médiation est plébiscitée par le gouvernement ainsi que par le législateur. Les revendications des
médiateurs auraient donc de fortes chances d’être entendues. Si cela était le cas, il serait aisé pour le
législateur de prohiber l’uberisation de la médiation.

Il ne faut cependant pas oublier que l'éventualité d'une uberisation de l’économie ainsi que la déprofessionnalisation des activités bousculent les certitudes quant à l’utilité des règles de déontologies professionnelles. Ceci, sans compter les bouleversements technologiques actuels et à venir qui peuvent remettre en cause l’actualité de ces dernières.

Pis, selon certains, les professionnels qui se plient au respect de ces règles éthiques, se condamneraient eux mêmes à disparaître, évincés par leurs concurrents, pour n’avoir pas su anticiper l’obsolescence de leur règles déontologiques.

De telles pensées révèlent avant toute chose le fait que la déontologie, en tant que corpus de règles destinées
à assurer l’exercice d’une profession dans les règles de l’art, est souvent vue à tort, comme un frein à
l’exercice d’une activité ou encore comme la loi d’une corporation jalouse de son monopole, de ses
prérogatives.

Cette vision est particulièrement injustifiée puisque la déontologie assure la moralité de tous les membres
d’une profession. La déontologie donne au professionnel la pleine conscience de l’importance de son
sacerdoce.

En outre, elle fait figure de garantie pour le client qui a conscience des exigences éthiques particulières qui
pèsent sur tel professionnel plutôt que sur tel autre. En conséquence, la déontologie assure la protection de
celui qui entend bénéficier des compétences d’un professionnel. Elle est la marque de la confiance qu’il peut
porter à ce dernier. La déontologie est d’autant plus forte lorsque sa violation s’accompagne d’une sanction :
du simple rappel à la règle jusqu’à l’éviction du professionnel indélicat de l’ordre ou du corps professionnel
auquel il appartient. Cette épée de Damoclès qui plane au-dessus de la tête du professionnel soumis à une
déontologie doit également rassurer celui qui le consulte.

Les médiateurs ne sont pas étrangers à la notion de déontologie. Bien au contraire, leur déontologie n’a de
cesse de leur rappeler la vocation qui les amène auprès des médiés qui sollicitent leur service. Cette exigence
qui est au cœur de la déontologie du médiateur, favorise la création d’un corps professionnel de médiateurs
homogène, c’est à dire venus d’horizons différents, bénéficiant d’expériences et de compétences diverses,
mais soumis aux mêmes exigences et impératifs quant à l’exercice de leur art.

Nul doute que c’est leur déontologie, qui continuera de faire émerger les médiateurs du lot, en les distinguant
à juste titre de ceux qui tenteraient d’uberiser la médiation et qui ne seraient en réalité que des braconniers
de la médiation.



Image, source Pixabay

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