L’impérieuse nécessité d’une intervention humaine lors de la médiation

Lorsque le processus de médiation ne se déroule pas en présentielle, le médiateur doit composer

avec l’absence de nombreux éléments du langage corporel voir renoncer à percevoir les émotions exprimées par les médiés.

La perte d’éléments de communication corporels majeurs à l’occasion d’une médiation en ligne

A l’occasion d’une médiation, la communication qui s’établit entre les médiés n’empruntera pas

uniquement le canal du langage verbal. La gestuelle des médiés peut rendre visible leurs émotions, soit en

accompagnant leurs paroles soit en prenant le relais de celles-ci.

Le médiateur est susceptible d’être le spectateur de cette communication non verbale lorsqu’il est mis en

présence des médiés.

Au contraire, si le médiateur se prête au jeu de la médiation en ligne, il ne sera plus en présence des médiés.

En conséquence, il ne pourra plus percevoir les corps des médiés ni leur gestuelle. En se privant de cette

source d’information, le médiateur percevra avec plus de difficulté l’état mental ou les émotions des médiés,si tant est que son interprétation ne trahit pas les éléments de langage non verbal des médiés, qu’il lui semble

alors percevoir ou deviner.

Evidemment, cette perte d’informations sera plus ou moins importante pour le médiateur selon le format

de médiation en ligne choisi : de la visio-conférence au simple échange de courriels.

En toute logique, le rôle du médiateur qui est de rétablir la communication, de favoriser le dialogue, ne peut

aboutir s’il ignore la nature des émotions des médiés à l’occasion du contentieux qui les oppose.

En conséquence, mener une médiation en ligne est une véritable gageure pour un médiateur.

Ce simple constat permet d’affirmer que l’uberisation de la médiation ne saurait se jouer intégralement sur

internet. Ce serait en effet faire fi du rôle des émotions lors d’un conflit, que de s’obstiner à diriger

systématiquement les médiés vers une plateforme logicielle sur internet.

Réciproquement, le médiateur qui se trouve en présence des médiés, leur communique par sa gestuelle, un

ensemble d’informations qui peut soutenir le processus de la médiation ou débloquer une situation dans

laquelle la communication serait rompue.Or, à l’occasion d’une médiation en ligne, les médiés eux-aussi

peuvent adhérer plus difficilement au processus de la médiation, parce que l’accès à la gestuelle et à l’attitude

du médiateur leur est coupée, qu’ils ne parviennent pas à percevoir les gestes d’apaisement, l’attitude

empathique et neutre du médiateur. La médiation ne peut en effet se contenter d’un canal de

communication purement virtuel.

L’utilité du l’intervention humaine dans la compréhension et le discernement des

comportements et émotions des médiés

Les émotions sont indissociables de la personne des médiés. Elles peuvent, à l’image des éléments

du langage corporel être gommées ou déformées par l’interposition d’une plateforme logicielle entre le

médiateurs et les médiés.

Ce faisant, c’est l’état d’esprit des parties qui est susceptible d’être trahi et d’échapper au médiateur.

Or, le rôle du médiateur est d’aider à reconstruire la relation qui a périclité et a donné le jour à de la

frustration, de la colère, du ressentiment, ou encore de la rancune. Il doit parvenir à rétablir le dialogue entre

les médiés. Il s’agit de renouer un lien chargé d’affect.

A ce titre, l’interaction entre le médiateur et les médiés parait essentielle pour mener à bien une médiation.

Le médiateur sera en effet à même de percevoir l’existence de tensions, de crispations ou encore de percevoir

des non-dits dont les parties auraient connaissances mais dont il n’aurait pas été informé. Or, les conflits

ont assurément ceci de commun qu’ils comportent toujours une part variable d’affect.

Les émotions que ces conflits génèrent peuvent être mises à profit dans le cadre du processus de médiation,

notamment parce qu’elles ont le mérite de mettre en exergue ce qui est important pour une partie et qui

n’est pas nécessairement avoué ou assumé par les médiés.

Elles peuvent révéler les besoins insatisfaits des parties, tel que la nécessité d’obtenir de la reconnaissance

par exemple.

La présence d’un médiateur, c’est-à-dire sa présence physique aux côtés des médiés est donc indispensable

afin d’identifier les émotions qui entrent en jeu.

Image, source Pixabay